25.1.07

Remise du diplôme du Grand prix national de l’architecture 2006 à Rudy Ricciotti

Cher Rudy Ricciotti,
Monsieur le Président de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine,
cher François de Mazières,
Messieurs les Présidents,
Messieurs les Directeurs,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Je suis très heureux d’être présent parmi vous ce soir, dans ce haut lieu de l’architecture et du patrimoine, pour remettre le Grand Prix national de l’architecture 2006 à Rudy Ricciotti.
Ce Grand Prix, vous le savez, j’ai tenu à le relancer, afin qu’il marque, tous les deux ans, la reconnaissance de la France envers ses architectes de renom. En 2004, c’est la personnalité, l’œuvre et le talent de Patrick Berger qui ont été récompensés. Cette année, sur la base des propositions exprimées par plus d’un millier de personnalités qualifiées, maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvres, journalistes, critiques, élus, responsables d’institutions et de lieux de diffusion, ainsi que je vous l’avais annoncé en avril 2006, c’est l’œuvre de Rudy Ricciotti qui a été choisie par le jury, que j’ai eu l’honneur de présider. C’est son parcours que nous allons célébrer ensemble.
Mais permettez-moi tout d’abord de dire quelques mots au sujet de la politique de l’architecture, à laquelle j’ai souhaité faire une place toute particulière, à la mesure des enjeux qu’elle représente, dès mon arrivée au ministère de la Culture et de la Communication.
L’année 2006 a été une année faste, puisqu’elle a vu s’ouvrir, ou se rouvrir, de nouveaux lieux de culture, au premier rang desquels le musée du Quai Branly, mais aussi le Musée des Arts décoratifs.
L’année qui vient verra encore de grands chantiers se clore et de nouveaux s’ouvrir. Je pense à la Philharmonie de Paris, dans le parc de La Villette, dont j’ai présidé récemment le jury pour le concours d’architecture, aux côtés du Maire de Paris. Je pense à la Cité de l’immigration à la Porte Dorée, à la Galerie des Gobelins et au Donjon du Château de Vincennes, qui ouvriront leurs portes cette année.
Je pense également à l’école nationale supérieure d’architecture de Paris Val-de-Seine, dont la réalisation vient confirmer l’engagement du ministère de la Culture et de la Communication en faveur de l’amélioration des conditions de travail des étudiants, des enseignants et du personnel administratif. Depuis trois ans, ont été ainsi achevées l’extension de l’école de Montpellier, celle de Lille, celle de Grenoble et la restructuration de l’école de Versailles. Les travaux de construction et de restructuration des écoles de Paris Val-de-Seine, dans l’ancienne usine d’air comprimé de la SUDAC, de Nantes et de Paris Belleville, seront achevés en 2007.
Je pense enfin, bien évidemment, à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine, dont nous attendons prochainement l’ouverture définitive, et qui offrira à l'architecture contemporaine et historique un lieu de diffusion, d'expression et de formation, de partage et d'échange d'expériences, dans un Palais rénové, et conçu pour l'accueil des collections historiques, des expositions temporaires et des colloques. Le projet de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine est fondé sur le décloisonnement et la réconciliation, autour d’un triple équilibre : entre création et patrimoine, entre Paris, les régions et l’international, et enfin entre professionnels et grand public.
Elle contribuera à diffuser la connaissance de l’art de bâtir et du cadre de vie, une discipline sans doute encore insuffisamment connue du grand public, alors que son impact sur la vie quotidienne, sur le logement comme sur l’environnement urbain, est crucial. C’est pourquoi je suis convaincu que nos concitoyens doivent être sensibilisés à ses grands enjeux. Nous devons faire de l’architecture une culture partagée, une culture du vivre ensemble, du cadre de vie, de la ville et du paysage. « Vivre les villes » : c’est, vous le savez, le nom de la troisième édition de la manifestation qui se déroulera sur l’ensemble du territoire du 16 au 18 mars prochain. Créée en 2004, et conduite en partenariat avec les ministères en charge de l’équipement et du logement, cette manifestation a pour objectif de mobiliser tous les acteurs de l’aménagement de l’espace, pour mieux en faire partager les enjeux aux Français.
Toujours dans le but de promouvoir l’action des professionnels de notre cadre de vie, j’ai tenu à mettre en lumière les talents les plus remarquables, avec le Grand Prix national de l’architecture, mais aussi les nouvelles générations, avec les Nouveaux Albums, destinés à favoriser l’insertion professionnelle et l’accès à la commande, pour les architectes et désormais les paysagistes de moins de 35 ans. Tous ces jeunes professionnels bénéficient d’un important dispositif de communication et reçoivent le soutien d’un cercle de parrainage qui réunit de nombreux et puissants partenaires privés et publics. Une première exposition leur a été consacrée en novembre 2006, dont j’ai confié la réalisation à Karine Herman, lauréate 2003-2004 des Nouveaux albums des jeunes architectes, à l’occasion de l’inauguration partielle des espaces de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine.
Vous le savez, j’ai souhaité installer en 2005 auprès de moi un comité regroupant l’ensemble des Grands Prix, afin de les consulter de façon régulière sur des grands sujets d’actualité liés à l’architecture. Il n’existait auparavant, au ministère de la Culture et de la Communication, aucune instance consultative dans le champ de l’architecture. Ce comité réunit désormais tous les architectes lauréats du Grand prix national de l’architecture, ainsi que le président du Conseil national de l’ordre des architectes, et se tient au moins une fois par an. La réunion du comité s’est tenue aujourd’hui dans les locaux de la Cité. Elle s’est attachée à réfléchir aux conditions du doctorat en architecture.
Mais j’en viens à présent au Grand Prix national de l’architecture.
Si j’ai souhaité relancer ce Grand Prix en 2004, après cinq années d’absence, c’est avec le désir d’offrir de nouveau à cette profession une visibilité par l’excellence, à travers la reconnaissance d’un talent confirmé.
Le Grand Prix a donc été attribué en 2006 à Rudy Ricciotti, qui porte haut les couleurs de l’architecture française en France et dans le monde.
Cher Rudy Ricciotti, permettez-moi, avant de vous remettre ce diplôme du Grand Prix national de l’architecture, réalisé par Daniel Buren, d’évoquer, en quelques mots, votre remarquable parcours.
Né à Alger, grandi dans le Sud de la France, c’est en Suisse que vous obtenez votre premier diplôme, à l’école d’ingénieurs de Genève. Vous intégrez ensuite l’école d’architecture de Marseille, dont vous sortez en 1980.
Le Sud, et les Cités baignées de soleil, Bandol, Marseille, Toulon, Ramatuelle, ou encore Manosque, pour n’en citer que quelques-unes, sont votre terrain de prédilection.
Sudiste engagé, « combattant anxieux » - selon vos propres termes - vous réalisez des programmes très divers : salles de spectacles, musées, médiathèques, équipements culturels, mais également bâtiments administratifs, scolaires, villas, parkings et aménagement urbains. Vous entendez répondre à tous les défis programmatiques qui vous sont proposés.
Mais c’est incontestablement le Stadium de Vitrolles, en 1994, qui marque les esprits, et qui vous fait immédiatement remarquer, en France comme, déjà, hors de nos frontières. Contemporain des débats sur la transparence des édifices, les vues traversantes et les peaux de verre, vous n’hésitez pourtant pas à ficher dans le sol un monolithe de béton noir, teinté dans la masse, dont les percées millimétrées ne servent pas tant à faire entrer la lumière, qu’à la faire sortir, pour les besoins de sa vie nocturne. Il n’en fallait pas plus pour installer la légende de votre insoumission et de votre anticonformisme.Les commanditaires internationaux vous réclament très vite et vous réalisez le Pont de la Paix à Séoul, et la Philharmonique Nikolaisaal de Potsdam, dont la blancheur bosselée de la salle de concert vous vaut tous les éloges et vous fait reconnaître comme un architecte « flamboyant ».
Vous avez remporté de nombreux concours, notamment internationaux, ces dernières années. La Mostra de Venise vous a ainsi choisi pour édifier son nouveau palais dédié au cinéma. Et j’attends personnellement, avec beaucoup d’impatience, de découvrir vos nouvelles réalisations, pour le département des Arts de l’Islam du musée du Louvre, et pour le musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée de Marseille, qui promettent tous deux d’être de véritables morceaux de bravoure. A l’image du Pavillon noir, centre chorégraphique national, à Aix-en-Provence, que j’ai eu le plaisir d’inaugurer en octobre dernier auprès d’Angelin Preljocaj.
Vous êtes flamboyant, c’est entendu. Mais vous savez aussi être discret lorsque que le contexte le rend nécessaire. Par respect. Par adéquation. Par considération de l’homme et de son environnement.
Comme pour ces villas que vous semblez faire disparaître, en les enchâssant dans leurs collines, et pour lesquelles vous aménagez des ouvertures au « format cinémascope » sur ces paysages lumineux du Sud que vous aimez tant.
Vous êtes un architecte à la fois lyrique et pragmatique. Je n’oublie pas que vous êtes également ingénieur. Vous êtes encore amateur et collectionneur d’art contemporain. Mais, sans doute, aussi, par-dessus tout, et plus secrètement, poète. Le résultat tangible en est une souplesse remarquable dans les formes et les structures de vos projets. Du poète vous avez aussi la liberté absolue, et l’audace, qui vous fait relever tous les défis, de la restructuration des Grands Moulins, dans la ZAC Rive Gauche, pour leur réutilisation par l’Université de Paris VII, à la construction d’un Centre d’essai et d’expertise des missiles en Méditerranée, dans le port de Toulon, pour le compte de la direction générale pour l’armement. Vous ne semblez limité par aucune idée fixe, par aucun carcan. Vous préférez explorer toutes les richesses des possibilités structurelles et plastiques pour en faire des formes, non seulement de l’imagination, mais de la vie même des hommes.
Cher Rudy Ricciotti, je suis très heureux de vous remettre le diplôme du Grand Prix national de l’architecture.






Renaud Donnedieu de Vabres



Cité de l’architecture et du patrimoine - mercredi 24 janvier 2007

1 commentaire:

Anonyme a dit…

putain quel suceur!