5.12.07

La Shon s'oppose à la construction durable

HORIZONS POINT DE VUE
N° 5423 du 02/11/2007 - page 490 , 726 mots

La Shon - surface hors œuvre nette des locaux, y compris l'épaisseur des murs - sert de base, depuis trente ans, au calcul des densités autorisées sur un terrain donné, le coefficient d'occupation des sols (le COS des plans d'urbanisme) étant le rapport entre la Shon et la surface du terrain. Elle sert de base au calcul de la charge foncière (le prix du terrain), des taxes locales, du nombre de places de stationnement à réaliser. L'intérêt du maître d'ouvrage, promoteur ou simple pétitionnaire consiste donc à réaliser le moins de Shon possible pour le plus de Shab (surface habitable) ou de SU (surface utile), car il paie la première et vend la seconde. Le rapport Shab ou SU sur Shon est devenu la contrainte principale imposée aux concepteurs. Si cette contrainte est lourde pour l'architecture, elle n'a pas de sens pour l'économie de la construction, à l'inverse du rapport Shab - Shob (surface hors œuvre brute).
La Shon est un monstre bureaucratique dont les effets pervers vont à l'encontre de tous les idéaux actuels en matière d'architecture, d'urbanisme et de développement durable. L'idéologie qui la sous-tend vise à éviter la densification des tissus urbains. Or, cette densification s'avère de nos jours une nécessité pour l'amélioration des logements comme pour la lutte contre l'étalement urbain.
Une valeur très variable. Obscur et illisible dans la réalité, le calcul de la Shon intègre, par exemple, les loggias, mais pas les balcons ; les celliers, mais pas les caves ; les locaux techniques en étages courants, mais pas en sous-sol ou en terrasse, etc. Au gré des politiques de l'Etat, 5 m2 sont retranchés par logement quelle que soit leur taille pour l'adaptation des locaux aux handicapés ou 5 %, voire 20 %, pour l'isolation thermique des logements hautement performants du point de vue énergétique (mais pas des bureaux).
La Shon a sans doute interdit, en France, le développement des doubles murs en façade, solution traditionnelle dans toute l'Europe du Nord qui assure la pérennité des façades et la suppression des ponts thermiques. Elle pénalise l'usage des matériaux naturels épais comme la terre ou la pierre. Elle s'oppose en pratique aux solutions d'isolation performantes et de récupération de chaleur comme les sur-isolations par l'extérieur avec bardage, les doubles peaux vitrées larges, les serres froides ou chaudes, les loggias fermées, les atriums. Elle renchérit le coût des espaces de distribution et celui des locaux de déchets dont le tri sélectif augmente l'importance. Elle va à l'encontre de la ventilation naturelle qui nécessite de larges gaines. Le recours à la Shon comme surface de référence se retrouve même dans le calcul réglementaire thermique : celui-ci s'opère sur la base d'un ratio de consommation conventionnelle ramenée à la Shon, alors que c'est une valeur très variable.
Pour définir le montant de la charge foncière, l'usage de la Shon aggrave la hausse du coût du foncier. A titre d'exemple, dans une ZAC parisienne où la charge foncière affectée à un mètre carré de Shon est le double du prix de la construction du mètre carré utile, la réalisation d'une double façade augmentant la Shon de 7,5 % entraîne un surcoût global de 5 %, sans compter le surcoût de la construction. De nombreux PLU (plan local d'urbanisme) ne font plus référence à la Shon, et certains aménageurs comme Territoires à Rennes vendent la charge foncière en fonction des mètres carrés habitables. La précision des plans de permis de construire rend d'ailleurs la vérification de la surface habitable plus facile que celle de la Shon.
On peut espérer que le Grenelle de l'Environnement convoqué par le ministre en charge de l'Urbanisme et de la Construction conduise à quelques réformes administratives. En voici une qui ne coûte rien et que tous les acteurs de la construction appellent de leurs vœux : la suppression de la Shon et son remplacement, quand c'est nécessaire, par la surface utile (la « surface louable ») des locaux de travail et par la surface habitable « chauffée » bien définie par la loi Carrez. Ces valeurs beaucoup plus pertinentes trouvent leur vérité dans la constance des dimensions de l'homme et de ses habitudes de vie sociale. Et pourquoi pas, à l'instar de certains pays voisins, passer au volume habitable, socialement plus équitable, et énergétiquement plus exact ?

Christian Devillers et Philippe Madec, architectes

5 commentaires:

Matt Mayer a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Matt Mayer a dit…
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Matt Mayer a dit…

Merci pour cet article très interessant et instructifs sur les effets pervers de la SHON. Effectivement je pense qu'un remplacement de la SHON par la SHAB satisferait l'ensemble des acteurs de la construction.

Matthieu Mayer, Etudiant Master management immobilier, construction et aménagement, Euromed Marseille.

Anonyme a dit…

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Anonyme a dit…

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